28 septembre 2006

Observatoire de la mondialisation :
le MEDEF s'y interesse de près...
(lettre recue le 20 septembre)


Monsieur le Sénateur,

"L’accompagnement des entreprises françaises dans leur démarche export est une des priorités de la Commission International du MEDEF, qui coopère étroitement avec les services du Ministère du Commerce Extérieur et la DG Commerce de la Commission européenne, chargée des négociations à l’OMC. L’émergence actuelle de concurrents étrangers susceptibles de déstabiliser nos entreprises alors qu’ils ne respectent pas les règles du jeu du commerce international est une source de préoccupation que nous partageons avec vous.

C’est la raison pour laquelle le MEDEF participe activement, aux côtés de l’UNICE, aux projets de réforme des règlements européens anti-dumping, des obstacles au commerce (ROC) et de la Base de Données Accès aux Marchés (MADB) de la DG Commerce. Ces outils européens, malheureusement largement méconnus par les entreprises françaises, permettent aux entreprises d’identifier et/ou dénoncer les barrières tarifaires et non tarifaires rencontrées sur les marchés tiers (montants des droits de douane, formalités d’importation, exigences sanitaires et phytosanitaires…).

En outre, le MEDEF a transmis à la Commission européenne ses réserves sur l’octroi du statut d’économie de marché à la Chine – décision qui porterait directement préjudice aux entreprises françaises victimes de dumping depuis ce pays.

Dans ce cadre, et devant l’échec des négociations du Cycle de Doha, j’ai pris connaissance avec intérêt de votre initiative visant à mettre en place un Observatoire des Pratiques du Commerce International et je me tiens à votre disposition pour discuter de ce projet avec vous.

Je vous prie de croire, Monsieur le Sénateur, à l’assurance de mes salutations distinguées. "

06 septembre 2006


BIENTOT UN OBSERVATOIRE DE LA MONDIALISATION ?
Voici un projet de proposition de loi sur le sujet pour lequel vous pouvez donner dès à présent votre avis :
Exposé des motifs

La théorie libre-échangiste, largement mise en pratique par le GATT à partir de 1974 et par l’OMC à partir de 1995, nous enseigne qu’à partir de la libre compétition de tous les acteurs au plan international découlera un équilibre bénéfique pour tous, basé sur une spécialisation harmonieuse…

Cette théorie, héritée de Ricardo il y a plus 2 siècles, soutient donc que les pays « riches » (USA, Europe, Japon…), sous réserve d’une spécialisation vers des productions à haute valeur ajoutée, ont tout intérêt à ouvrir leurs marchés nationaux aux pays qui possèdent actuellement des coûts salariaux très bas, ceux-ci se spécialisant tout naturellement vers des productions à faible valeur ajoutée.

Cette théorie éminemment séduisante au plan théorique, hélas, ne se vérifie pas forcément dans la réalité car elle omet trois points importants :

- 1ère omission : Tout d’abord, rien n’indique que les pays à bas coût salarial se limiteront à des productions à faible valeur ajoutée .

A l’heure actuelle, l’Inde forme plus d’ingénieurs chaque année que l’Europe et les Etats-Unis réunis. La Chine, qui vient d’envoyer des hommes dans l’espace, vient de réussir sa première greffe du visage montrant ainsi que sa médecine de pointe a déjà rattrapé le niveau européen. Airbus va installer des unités de production en Chine, et EADS en Inde, donnant ainsi à ces pays les clés pour produire une aéronautique de pointe dans 15 ans (l’Américain Westinghouse va faire de même pour les centrales nucléaires …).

Ces quelques exemples illustrent à quel point les pays à bas coût salarial sont en train de rattraper les niveaux de technologies des pays dits « riches ».

Dès lors il est illusoire de croire que nous pourrons nous spécialiser obligatoirement à notre avantage sur des produits à haute valeur ajoutée, car sur ces produits là aussi, la guerre des coûts fera rage.

- 2nde omission : Cette compétition mondiale, de surcroît, compresse les salaires et donc la consommation intérieure, principale composante de la croissance

Il est évident que la création d’un marché mondial unique du travail (essentiellement pour les non-qualifiés, mais aussi depuis peu pour les qualifiés), a pour conséquence la compression des salaires des pays les plus « chers », comprimant également la demande globale. Certes, certains prix peuvent baisser, mais le bilan reste négatif face à une part des salaires dans la valeur ajoutée qui passe de 63% à 59% (moyenne des 10 pays les plus industrialisés- source BRI).


- 3ème et dernière omission : Tous les membres de l’O.M.C. ne jouent pas avec les mêmes règles du jeu .

Les négociations à l’OMC ont pour objectif à chaque fois de libéraliser le commerce international en faisant chuter le niveau de protection douanière ainsi que les quotas des pays membres. Or, à ce jour, non seulement, il apparaît que l’arsenal douanier des pays dits « émergents », déjà dopés par un bas coût salarial, n’a pas disparu, mais il n’existe pas d’indicateurs fiables quant aux pratiques protectionnistes dites « déguisées » : sous-évaluations monétaires, dumping, contrefaçons, transferts obligatoires de technologie, marchés protégés, travail illégal des enfants ou de prisonniers, non respect de l’environnement, corruption à grande échelle… L’Europe, quant à elle, en respectant scrupuleusement ces obligations, supporte un surcoût important qui pèse sur ses exportations, ainsi que le faisait remarquer récemment Peter Mandelson lui-même. Aux U.S.A., la sous-évaluation du yuan chinois par exemple, provoque de sérieux débats et des tentations protectionnistes.


Le 29 mai 2005, les Français n’ont pas rejeté l’Europe mais l’idée d’une certaine Europe de plus en plus ouverte et économiquement à la merci de nations technologiquement aussi bien armées qu’elle, nanties d’un coût salarial contre lequel elles ne peuvent lutter et qui, de surcroît, pratiquent des politiques protectionnistes déguisées alors que nous nous imposons de jouer le jeu d’un libre-échange intégral , sans règles du jeu.
Or l’importance de ces phénomènes est gigantesque pour l’économie européenne car cette compression des coûts d’échelle planétaire affecte également les politiques budgétaires et monétaires des Etats.

Oui à une Mondialisation, mais Loyale !

L’objet de la présente proposition de loi est de créer un Observatoire des Pratiques du Commerce International et de la Mondialisation.

Cet Observatoire aurait pour tâche de créer un indicateur statistique synthétisant le respect par les pays membres de l’OMC d’un certain nombre de paramètres qui affectent le commerce international : sous-évaluations monétaires, dumping, contrefaçons, transferts obligatoires de technologie, marchés protégés, travail illégal des enfants ou de prisonniers, non respect de l’environnement…

Ainsi pour chacun des pays étudiés, cet observatoire pourrait attribuer une notation, (de type « A++ »ou « C- -» par exemple), qui procurera aux milieux économiques et politiques un éclairage réaliste sur la situation du commerce international, pointant ainsi du doigt les pratiques déloyales de certains Etats.


Proposition de loi :
Article 1er
Le respect de pratiques loyales en matière de commerce international est reconnue comme la condition première de l’équilibre économique et social général des Nations.
Il est créé un Observatoire des Pratiques du Commerce International et de la Mondialisation afin de s’assurer du respect de ces pratiques.
Article 2
L’ Observatoire des Pratiques du Commerce International et de la Mondialisation est chargé de collecter toute information concernant le commerce international entre Etats en liaison avec les organismes de recherche, les missions économiques françaises à l’étranger, l’Union Européenne et l’Organisation Mondiale du Commerce.
Il établit une liste de règles en matière de commerce international et s’assure chaque année de leurs respect par les Etats.
Il remet chaque année un rapport public au Président de la République, qui est ensuite transmis au Parlement.
Article 3
L’ Observatoire des Pratiques du Commerce International et de la Mondialisation est financé par des fonds publics et des fonds privés. Il peut intervenir auprès des entreprises dans le cadre de prestations de conseil.
Le siège, la composition, les modes de désignation des membres et les règles de fonctionnement de l’Observatoire, y compris en matière de recrutement de contractuels, sont fixés par décret.