03 avril 2006


CLUB LES EUROPEENS :
LA CHINE MERE-PATRIE DU COMMERCE DELOYAL


- La chine est elle protectionniste?

Récemment, M. Peter Mandelson affirmait avec raison que l’Europe était le marché le plus ouvert du monde .Il est vrai aujourd’hui que mise à part la PAC, l’ensemble des barrières tarifaires ou contingentaires a été démantelé en Europe.

A l’inverse, aujourd’hui, la Chine demeure un marché excessivement fermé malgré son adhésion à l’O.M.C. en 2001 :

- Des normes spécifiques :

Aujourd’hui, la Chine est-elle en train de mettre en place toute une batterie de standards spécifiques qui empêchent les nouveaux standards mondiaux d’exister sur son territoire national, empêchant de par là même les investissements étrangers de se réaliser. Ainsi par exemple aujourd’hui la norme ISO ne s’applique-t-elle pas en Chine.

Un des plus beaux exemples de protectionnisme déguisé concerne-t-il la puce Intel Wifi dont la norme 802.11 ne s’applique pas en Chine. La Chine a décidé en effet de créer son propre standard Wapi qui lui assurera une maîtrise parfaite de son environnement en matière de télécommunication. Les déboires de Google en Chine procèdent également de cette volonté de fermeture. Cependant, d’autres industries, moins stratégiques pâtissent également de cette volonté de fermeture (le DVD par exemple).

- Des transferts de technologies obligatoires :

Un exemple concret est celui du train magnétique Pékin/Shangaï construit par l’Allemand Siemens, financé par le contribuable allemand et dont les Chinois sont actuellement en train de copie la technologie, contre la promesse très vague de construire d’autres voies ferrées dans le pays.

Un autre exemple récent est constitué par les déboires de la société Areva, qui n’a pas souhaité faire de transfert de technologie de ses centrales nucléaires et qui a donc perdu le marché chinois au profit de l’Américain Westinghouse.

La Chine a d’ailleurs construit l’empire du constructeur informatique Lenovo sur le copiage des ordinateurs américains. Elle est en train en ce moment de copier la technologie d’Airbus A 320… (Des industries bien moins stratégiques comme celles de la bière peuvent également subir du copiage).


- Le fonctionnement oligarchique d’une économie dirigée par le P.C.C. :

Aujourd’hui l’économie chinoise a pour objectif de créer les champions mondiaux industriels dans l’ensemble des secteurs, peu importe la façon d’y arriver. Ainsi le gouvernement peut-il manipuler le taux d’intérêt, le prix des actifs ou la législation en vigueur à sa guise afin de conserver des champions mondiaux aux couleurs exclusivement chinoises.

Un exemple concret est celui de l’existence, jusqu’il y peu, d’actions réservées aux investisseurs étrangers ne donnant aucun droit de vote et qui n’étaient donc en fait pas de véritables titres de propriété. Ces actions spécifiques ont désormais disparu mais il est toujours impossible pour un investisseur étranger de posséder plus que X % du capital d’une entreprise (% variable selon les secteurs), ou d’avoir accès à l’ensemble du territoire chinois pour son activité des règles concernant le capital bloqué ou une fiscalité variable selon les régions ou le bon vouloir de l’administration. Pour un investisseur occidental il y aura toujours une barrière invisible tels que des terrains trop chers ou des investissements inutiles à réaliser pour avoir accès à tel ou tel marché… Peugeot l’a d’ailleurs appris à ses dépens.

En ce qui concerne les rapports sociaux, le syndicat unique chinois (ACFTU) demeure le partenaire incontournable.

- Lenteur et incertitude des processus de décisions :

Aujourd’hui, contrairement à une idée répandue la Chine est le royaume de la fonction publique et des échelons administratifs qui se superposent ou se contredisent.

Les occidentaux qui souhaiteraient réaliser des investissements sont obligés bien souvent de passer par des « consultants » spécialisés qui leur coûtent très chers et peuvent parfois même les induire en erreur si le Parti le leur a demandé.

Le « sceau rouge » de l’administration chinoise est la chose la plus difficile au monde à obtenir lorsqu’on souhaite investir dans un secteur stratégique… Soudain, le nombre d’interlocuteurs se multiplie et les formulaires à obtenir s’empilent.

- Corruption et espionnage :

Les pratiques illégales sont monnaie courante dans ce pays et la corruption a atteint un niveau tel que ce pays ait été classé en 71ème position dans le palmarès mondial de la corruption ex-aequo avec la Syrie…

- Des droits de douane qui restent élevés en Chine :

La Chine a un taux moyen de droits de douane directs (calculés hors quotas et barrières déguisées) de 10 %, et l’Union Européenne moins de 4 %...

Enfin, certains produits sont taxés à des pics tarifaires de 45 à 50 % lorsqu’ils sont considérés comme stratégiques.




- Une insécurité juridique totale :

Le cadre juridique est si flou en Chine que seuls les autochtones s’y retrouvent véritablement ce qui constitue une forme de protectionnisme déguisée très subtil. Ainsi, encore ainsi, la codification des textes demeure-t-elle encore aujourd’hui un vœu pieux.

D’autre part la Chine a l’habitude de créer des « lois provisoires » ou de simples déclarations de principe que les innombrables échelons inférieurs se chargent de préciser.

Enfin, le système judiciaire est parfois incompétent.


Le dumping peut-il demeurer une des clés de voûte du système économique chinois ?


Plutôt que de faire un long discours, relisons ce qu’écrivait Peter Mandelson dans un article du Figaro très récemment :

« Bien que notre enquête ait porté sur des sociétés désignées par les pouvoirs publics chinois et vietnamiens eux-mêmes, elle a mis au jour des preuves irréfutables d’une intervention étatique déloyale et de l’octroi de subventions déguisées en Chine et au Vietnam. En plus d’avoir constaté des pratiques comptables laissant à désirer, la Commission dispose de preuves manifestes de l’octroi, aux producteurs, de prêts non commerciaux ou de subventions accordées par l’Etat, d’une mauvaise évaluation des actifs, de l’application de loyers fonciers non conformes au x prix du marché et d’abattements fiscaux importants ».

Cet article est l’aveu d’un échec et d’une impuissance ! L’échec est celui d’une organisation mondiale du commerce qui est basée sur le respect de règles admises par tous, selon un fonctionnement démocratique. Or bon nombre de nos compétiteurs aujourd’hui n’accordent pas la même signification que nous à la notion d’état de droit. Le débat mondial sur le « patriotisme économique » n’a pas lieu d’être en Chine puisqu’il est communément admis partout que les capitaux doivent rester chinois et que la compétition internationale se teinte fortement de nationalisme économique n’ayant pas peur de transgresser les règles.

L’impuissance est celle d’une Europe qui, bien au contraire se charge d’appliquer au maximum et de manière très scrupuleuse les règles de base du commerce international, même au prix de la liquidation de filières entières comme celles du textile ou de la banane.


La contrefaçon est-elle une pratique tolérable ?


Aujourd’hui la contrefaçon chinoise (qui passe via Dubaï) correspond à 70 % de la contrefaçon mondiale arrivant en Europe.

Aucune industrie n’y échappe, depuis le textile, en passant par les DVD ou même encore récemment des logiciels Windows.

Philips par exemple estime à 200 millions d’euros par an le manque à gagner en terme de royalties causé par la contrefaçon de ses produits Hifi. Aujourd’hui il est possible de s’acheter une contrefaçon Breitling entre 15 et 60 € sur le marché de Shangaï.

Quel est le coût du non-respect de l’environnement en Chine ?


Les industriels européens et américains sont, fort heureusement contraints de respecter l’environnement écologique et humain, ce qui constitue la base du développement durable.

Le projet « Reach », qui consiste à inverser la charge de la preuve en matière de dangerosité des produits industriels constitue la preuve s’il en était que toutes ces précautions ont un coût pour ces industriels que ne supportent évidemment pas nos compétiteurs chinois mais aussi les autres pays émergents, Inde, Brésil, Turquie…

Une actualité brûlante : un immense territoire chinois est aujourd’hui pollué au dernier degré, ce qu’avait caché les autorités chinoises . Le smog toxique atteint aujourd’hui des proportions alarmantes à Pékin, Shangaï ou Canton.

Les entreprises européennes doivent prendre toutes sortes de précautions très coûteuses lorsqu’il s’agit de produits dangereux (Directive Seveso) tandis qu’en Chine ces réglementations sont inconnues.

S’il est impossible de chiffrer de manière concrète « l’avantage comparatif » du non respect de l’environnement, nous devons considérer qu’il est relativement important.

D’autre part, le non respect des Droits de l’Homme (travail des enfants) ou de l’environnement au travail (travail de nuit, travaux pénibles) constituent également des sources « d’économies » pour les entreprises chinoises.


Le yuan est-il correctement évalué ?


Aujourd’hui avec un cours de 8 yuans pour 1 dollar environ, la monnaie chinoise est très sous-évaluée, ce qui lui permet de conquérir des marchés de manière artificielle tout en protégeant les siens (c’est un protectionnisme déguisé).

La preuve de cette sous-évaluation réside dans l’énorme quantité de dollars que la Chine doit acheter afin de garder cette parité (plus de 800 milliards en 2006), qui met en danger l’équilibre financier international.


La division du travail est-elle possible avec un écart salarial de 1 à 20 ?


De nombreuses études dont celle remarquable menée par M. le Sénateur Jean Arthuis ont montré le danger des délocalisations (ou de l’absence de localisation) des activités industrielles ou de services alors que le coût salarial horaire est de 1 dollar en Chine contre 18 aux U.S.A. et 25 en Allemagne.

Les plus éminents économistes nous diront qu’il faut alors se spécialiser vers des activités à haute valeur ajoutée… Mais cela devient de plus en plus un leurre…

La Chine est en effet un pays qui envoie des hommes dans l’espace (ce que ne fait pas l’Europe) et l’Inde produit déjà plus d’informaticiens que les U.S.A. et l’Europe réunis.

Que nous restera t-il alors ?

Les rares activités dans lesquelles nous pourrions avoir un avantage comparatif suffiront-elles pour employer toute notre population active à un niveau de salaire décent ? Suffiront-elles pour assurer à l’Europe sinon un rôle de dominant, du moins le rôle d’une véritable puissance qui compte ? Une croissance est-elle même tout simplement possible avec une demande tirée vers le bas par le niveau du salaire chinois ?

La définition de « loyauté », selon le dictionnaire est celle d’une fidélité par rapport à un accord que l’on a passé. Cette notion de respect d’un accord trouve-t-elle sa place lorsque les forces en présence sont si disproportionnées ?

En mettant en balance des écarts de productivité aussi importants, on ne respecte pas l’accord tacite intergénérationnel qui veut que chaque génération, grâce à ses efforts, assure un meilleur niveau de vie à ses enfants que la génération précédente.