03 mars 2006





CLUB LES EUROPEENS
FICHES TECHNIQUES


Le groupe de travail sur la mondialisation du club "les Européens", réservé aux parlementaires, a neanmoins besoin des avis des internautes sur les fiches suivantes, qui seront à la base du travail des membres :


FICHE I :
DUMPING SOCIAL, MONETAIRE ET ENVIRONNEMENTAL :
LE LIBRE-ECHANGE ACTUEL EST-IL LIBERAL ?


Etat du commerce mondial :

Trois types d’économies existent aujourd’hui :

1 – Les pays « riches », développés économiquement (U.S.A., Europe, Japon).
2 – Les pays émergents : Chine, Inde, Brésil, etc…
3 – Les P.M.A.

Les pays « riches » (1) possèdent un capital en abondance et une main d’œuvre chère et qualifiée. Les pays émergents (2) commencent à posséder un capital abondant ainsi qu’une main d’œuvre qualifiée et peu chère. Les pays (3) possèdent peu de capital et une main d’œuvre peu chère mais non qualifiée.

S’inspirant de Ricardo, la théorie libre-échangiste, soutenue par le GATT, puis l’OMC et par la plupart des dirigeants des pays riches, suppose que chacun se spécialisera dans les secteurs où il possède l’avantage comparatif le plus important, c’est-à-dire là où il sera le meilleur (ou le moins mauvais).

Cette vision des choses (que les Keynésiens réfutent) suppose qu’un cadre concurrentiel loyal existe !

En effet, la base de la théorie libérale suppose qu’existe un cadre législatif qui assure que la compétition soit « loyale ». Sans ce cadre normatif, aucune théorie ne peut s’appliquer car c’est la concurrence elle-même qui ne s’exerce pas, puisqu’elle est remplacée par l’anarchie.

Or le Commerce Mondial actuellement est-il loyal ?

Je vous propose à titre d’exemple d’entamer une réflexion sur les 5 points suivants :

1er point : la division du travail est-elle possible ?

De nombreuses études dont celle remarquable menée par M. le Sénateur Jean Arthuis ont montré le danger des délocalisations (ou de l’absence de localisation) des activités industrielles ou de services alors que le coût salarial horaire est de 1 dollar en Chine contre 18 aux U.S.A. et 25 en Allemagne.

Les plus éminents économistes nous diront qu’il faut alors se spécialiser vers des activités à haute valeur ajoutée… Mais cela devient de plus en plus un leurre…

La Chine est en effet un pays qui envoie des hommes dans l’espace (ce que ne fait pas l’Europe) et l’Inde produit déjà plus d’informaticiens que toute l’Europe réunie.

Que nous restera t-il alors ?
Les rares activités dans lesquelles nous pourrions avoir un avantage comparatif suffiront-elles pour employer toute notre population active ? Suffiront-elles pour assurer à l’Europe sinon un rôle de dominant, du moins le rôle d’une véritable puissance qui compte ?


2ème point : Les monnaies sont-elles correctement évaluées ?

Aujourd’hui avec un cours de 8 yuans pour 1 dollar environ, la monnaie chinoise est très sous-évaluée, ce qui lui permet de conquérir des marchés de manière artificielle tout en protégeant les siens (c’est un protectionnisme déguisé).

La preuve de cette sous-évaluation réside dans l’énorme quantité de dollars que la Chine doit acheter afin de garder cette parité (plus de 800 milliards en 2006), qui met en danger l’équilibre financier international.


3ème point : Le respect de l’environnement est-il le même partout ?

Les industriels européens et américains sont, fort heureusement contraints de respecter l’environnement écologique et humain, ce qui constitue la base du développement durable.

Le projet « Reach », qui consiste à inverser la charge de la preuve en matière de dangerosité des produits industriels constitue la preuve s’il en était que toutes ces précautions ont un coût pour ces industriels que ne supportent évidemment pas nos compétiteurs chinois mais aussi les autres pays émergents, Inde, Brésil, Turquie…

Une actualité brûlante : un immense territoire chinois est aujourd’hui pollué au dernier degré, ce qu’avait caché les autorités chinoises (sans compter la grippe aviaire).


4ème point : Les politiques protectionnistes ont-elles partout disparu ?

Récemment, M. Peter Mandelson affirmait avec raison que l’Europe était le marché le plus ouvert du monde.

Il est vrai aujourd’hui que mise à part la PAC, l’ensemble des barrières tarifaires ou contingentaires a été démantelé en Europe.

La pathétique histoire des pantalons chinois qui ont attendu 6 mois sur les quais des ports européens, le temps que la Commission européenne fasse oublier les milliers d’emplois perdus dans le secteur textile, est symptomatique d’une société qui se voit encore conquérante alors qu’elle est à la merci d’économies émergentes qui tôt ou tard lui porteront un coup fatal.
Aujourd’hui, en Chine les barrières tarifaires existent toujours, qu’elles soient officielles ou déguisées sous forme de tracasserie administrative.

Aux Etats-Unis, l’article Super 301 autorise la levée d’importantes taxes douanières dès lors que l’économie est menacée (acier ou textile).


Il est donc paradoxal et quelque peu indécent, d’écouter M. Pascal Lamy faire le procès d’une Europe qui ne s’ouvrirait pas assez aux produits agricoles des pays émergents, alors qu’il ne trouve rien à dire au fait que les Etats-Unis aident encore davantage que l’Europe son agriculture (en 2005, les cotonniers recevront 4,5 Milliards de dollars soit autant que leur propre production).

5ème point : Les investissements internationaux sont-ils réellement libres ?

Aujourd’hui que ce soit en Chine ou aux Etats-Unis, les investissements qualifiés de stratégiques empêchent bon nombre d’investissements de se réaliser.

Ainsi par exemple aujourd’hui, la Chine est-elle en train de mettre en place toute une batterie de standards spécifiques qui empêchent les nouveaux standards informatiques et téléphoniques (Wifi notamment) de pénétrer leurs marchés.

En matière militaire la situation est identique et la plupart des achats d’armes dans le monde sont réalisés sous pression américaine (voir les achats d’avions militaires américains en Pologne).

La bataille sur Arcelor constitue la preuve absolue de l’inefficacité de l’Europe dans sa protection d’industries stratégiques.

En effet à aucun moment, par la voie de sa Commissaire à la Concurrence, Mme Nelly Kroes, il n’a été question d’empêcher une entreprise à capitaux familiaux (donc non opéable) de se débarrasser d’un concurrent pour le moins gênant car en meilleure santé financière.






FICHE II :
POLITIQUE ECONOMIQUE EUROPEENNE :
Y-A T-IL UNE ALTERNATIVE A LA STAGNATION ?




Situation économique de l’Europe :

Deux blocs économiques, avec des types de croissance très distinctes coexistent en Europe aujourd’hui :

- Le Bloc « allemand » (1) : De loin le plus important.

Il comprend l’Allemagne, la France et l’Italie, avec leurs économies « satellites » : Bénélux + pays de l’Est.

La croissance y est faible (de 1 à 2 %) et le taux de chômage élevé. Il correspond au cœur industriel de l’Europe touché de plein fouet par la concurrence chinoise

- Le Bloc « anglais » (2) : qui comprend aussi l’Irlande et le Danemark.

La croissance y est plus forte (2 à 3 %), malgré un tassement récent, et le chômage globalement plus faible. Il correspond à une croissance basée sur les services, notamment financiers et immobiliers.

L’Espagne appartient aussi, étrangement, à ce groupe, avec une croissance du secteur immobilier financé par les fonds structurels.

Le bloc (1) est , sur longue période, un bloc excédentaire au niveau commercial (l’Allemagne est le premier exportateur mondial et le premier excédent).

Le bloc (2) est, sur longue période, déficitaire.

La situation de l’emploi dans toute l’Europe est inquiétante :

Il n’est nul besoin de s'apesantir sur la situation de l’emploi en France, en Allemagne ou en Italie. Par contre les chiffres du chômage réel dans certains pays notamment anglais ou scandinave ont également des allures inquiétantes compte tenu de l’importance d’un chômage « caché » des statistiques officiels.

Ainsi en Grande-Bretagne 3 millions de personnes bénéficient d’une allocation pour handicapé (contre 500 000 en France à population comparable), ces personnes n’étant pas comptabilisées comme chômeurs et échappant ainsi à la statistique.

Aux Pays-Bas ou en Suède ces chiffres seraient encore plus importants proportionnellement…

Deux thèses s’affrontent pour retrouver une croissance forte et un taux de chômage socialement acceptable :

- S’adapter à la mondialisation par un ajustement des salaires européens au niveau de nos compétiteurs des pays émergents (Chine, Inde, Brésil…).

Le problème est qu’un tel ajustement a pour objet de peser sur la demande intérieure qui représente encore en moyenne les ¾ de la demande globale.

De surcroît l’Allemagne est le contre-exemple d’une telle politique : devenue la première puissance compétitive de la planète avec le plus fort excédent commercial jamais engrangé, elle comptabilise aujourd’hui plus de 5 millions de chômeurs…


- Retrouver une croissance forte par les méthodes employées jusque dans les années 80 en Europe et encore aujourd’hui aux U.S.A. Il s’agit de politiques keynésiennes traditionnelles expansionnistes conjuguant une politique budgétaire, monétaire et salariale expansionniste dans toute l’Europe.

Elle suppose que les Nations et la Banque Centrale Européenne agissent de concert dans ce sens.


Problème : Toute politique expansionniste dans un cadre commercial ouvert tel que le nôtre profitera d’abord aux produits des pays émergents et l’Europe basculera (comme les U.S.A.) dans un déficit commercial abyssal.


La résolution de cette équation consiste à retrouver un niveau acceptable de Préférence communautaire afin de supprimer le déséquilibre actuel des échanges analysé dans la fiche II.





FICHE III :
FAUT-IL CRÉER UN OBSERVATOIRE DU COMMERCE INTERNATIONAL ?




Face à un déficit commercial de 200 Mds de $ (sur un déficit total record de 725 Mds de $), la Chambre des représentants américaine a décidé de créer une commission parlementaire chargée d’examiner les conditions dans lesquelles la Chine commerce avec les autres Nations.

Cette commission a d’ores et déjà qualifié « d’inéquitable et de déséquilibré » le commerce chinois qui ne respecterait pas des taux de change corrects et ne respecterait ni l’environnement ni les droits de l’homme fondamentaux.


L’Europe, après avoir abandonné l’ensemble de l’industrie à une concurrence asiatique déloyale se propose dans le même temps de libéraliser et de démanteler ce qui reste de Politique Agricole Commune.


Face à ce décalage, notre rôle pourrait consister à nous donner les moyens de pointer du doigt l’ensemble des pratiques concurrentielles déloyales qui fragilisent nos économies.

La création d’un Observatoire du Commerce International pourrait être l’outil adapté à ce devoir d’information.