08 novembre 2006


COMMERCE INTERNATIONAL : L'EUROPE SE REND COMPTE QUE LA CHINE NE PRATIQUE PAS UN COMMERCE LOYAL !
Extrait du Figaro du 8 novembre 2006 :

"Commerce : la Chine se moque des griefs des Européens

Pékin reproche vivement à Bruxelles de s’aligner sur la politique commerciale agressive des Etats-Unis.


Comme les Etats-Unis aux yeux de Téhéran, Pékin vient de désigner son grand Satan en matière commerciale : l’Union européenne. Au lendemain d’un sommet avec l’Afrique, où elle n’a cessé, durant trois jours, de faire les yeux doux au continent noir, la Chine a administré hier une volée de bois vert à Bruxelles, ou plutôt à son représentant de passage à Pékin, coupable à ses yeux de céder aux caprices d’une politique commerciale jugée trop agressive à son égard. A l’issue d’une rencontre avec le commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson, son homologue chinois, le ministre Bo Xilaï, a vivement critiqué les mesures antidumping visant à taxer les chaussures en cuir chinoises exportées vers le marché unique, une initiative qui provoque un « fort mécontentement » à Pékin a-t-il martelé.
De même, Bo Xilaï a jugé « regrettable » les poursuites engagées par Bruxelles devant l’OMC destinées à éliminer les surtaxes (25 % au lieu de 10 %) imposées par la Chine sur les pièces automobiles importées par les manufacturiers européens implantés sur le territoire asiatique. Pékin conteste l’interprétation européenne selon laquelle ces mesures jugées anticoncurrentielles seraient destinées à favoriser les équipementiers chinois. « Nous avons initié des actions en vue d’une solution à l’amiable mais l’UE a finalement décidé de se tourner vers l’OMC » a regretté Bo Xilaï.

Valet des Etats-Unis
A l’écoute de la longue litanie des reproches exprimés par le dirigeant chinois, difficilement compensée par l’annonce parallèle de programmes de coopération (acier, PME…), Peter Mandelson avait bien du mal à dissimuler son embarras. « On a connu pire avec les Chinois » tentait de se rassurer un diplomate européen. En fait, le mécontentement de Pékin fait suite à la publication récente, par l’exécutif communautaire, d’un document très critique à l’égard du protectionnisme économique chinois, des barrières non tarifaires destinées à décourager les investisseurs étrangers ainsi que des violations par les entreprises chinoises des droits de propriétés intellectuelles.

Résultat, explique Bruxelles, la balance commerciale bilatérale est de plus en plus déficitaire : les exportations chinoises vers l’UE, notamment les textiles à bas prix, ont atteint 158 milliards d’euros en 2005, alors que les exportations européennes vers la Chine n’ont pas dépassé les 52 milliards. « Il existe une perception croissante en Europe selon laquelle la Chine ne commerce pas de manière équitable », a déclaré hier Mandelson devant un parterre d’étudiants de l’université de Tshinghua.

A l’inverse, Pékin estime avoir consenti de nombreux efforts depuis son adhésion à l’OMC en 2001, insuffisamment salués, selon elle, par Bruxelles. Pire, une campagne de presse orchestrée depuis quelques semaines par le régime chinois tend à présenter l’Europe comme un valet des Etats-Unis, calquant sa politique commerciale, sur celle, traditionnellement plus agressive, conduite par Washington. « L’UE peut-elle encore prétendre à être une puissance indépendante ? » s’interroge le quotidien de la Jeunesse.

Pékin critique le manque de « transparence » des statistiques communautaires relatives au dumping. La Chine reproche surtout à l’UE de chercher à complaire aux Etats-Unis en refusant de lever l’embargo sur les ventes d’armes à l’empire du Milieu, décrété à la suite du massacre de la place Tiananmen en 1989. Washington, tout comme Ottawa, poursuit également Pékin devant l’OMC pour les taxes sur les pièces automobiles.
Enfin, la Chine suspecte les Etats-Unis de vouloir étendre ses représailles juridiques au domaine de la propriété intellectuelle et de chercher à rallier Bruxelles à son combat. Sur ce point, Mandelson a cherché, hier, à rassurer Bo Xilaï. Il ne l’a manifestement pas convaincu.